Encore une fois c’est l’aube
et je n’y arrive pas
je n’y arrive plus
à dormir à voyager à écrire
les yeux me brûlent à force d’essayer
quitter les lieux sur le champ
arracher toutes les fleurs
briser chaque fenêtre
avec une pierre
viser obstinément le centre
prendre un poème
claquer la porte
maintenant tout s’efface
la page est blanche
vide mais blanche
chaque jour je pense à vous
ça me tient debout
bancale mais debout
cette idée de vous rencontrer
cette folie de vouloir vous aimer
ça n’a aucun sens
je ne vous connais pas
je ne sais rien de vous
je ne vous plairai pas
mais je crois que vous me plaisez
que vous me plaisez beaucoup
que ça ne s’invente pas
cette chose-là
elle sera toujours contenue dans la parenthèse
dans le silence
dans le noir de la chambre
cette lueur
la clarté de nos draps
et au matin la beauté le jardin les oiseaux
cet effroi splendide
ne plus rien en dire
jamais
le vivre une dernière fois
une première fois
pour de bon
jusqu’au bout
dans cette cabane qui nous abrite
qu’importe le vent la pluie
au diable les prières la mélancolie
la chaleur de ton souffle
dans le creux de mes mains
ce feu de joie qui flambe
et gonfle la poitrine
parcourir avec la bouche les doigts
recueillir chaque mot enseveli à l’intérieur de nous
je me suis toujours défilée
j’ai fugué sans arrêt
j’ai eu peur
j’ai été lâche
je le suis encore
et je suis fatiguée
puisque je ne dors pas
fatiguée mais vivante
et ce n’était pas vous
avec vous je voudrais rester
rester jusqu’au bout
